Paul Eluard /Luigi Nono: La Victoire de Guernica , analyse par bacdefrancais.net

La victoire de Guernica

I

Beau monde des masures

De la nuit et des champs

II

Visages bons au feu visages bons au fond

Aux refus à la nuit aux injures aux coups

III

Visages bons à tout

Voici le vide qui vous fixe

Votre mort va servir d’exemple

IV

La mort coeur renversé

V

Ils vous ont fait payer la pain

Le ciel la terre l’eau le sommeil

Et la misère

De votre vie

VI

Ils disaient désirer la bonne intelligence

Ils rationnaient les forts jugeaient les fous

Faisaient l’aumône partageaient un sou en deux

Ils saluaient les cadavres

Ils s’accablaient de politesses

VII

Ils persévèrent ils exagèrent ils ne sont pas de notre monde

VIII

Les femmes les enfants ont le même trésor

De feuilles vertes de printemps et de lait pur

Et de durée

Dans leurs yeux purs

IX

Les femmes les enfants ont le même trésor

Dans les yeux

Les hommes le défendent comme ils peuvent

X

Les femmes les enfants ont les mêmes roses rouges

Dans les yeux

Chacun montre son sang

XI

La peur et le courage de vivre et de mourir

La mort si difficile et si facile

XII

Hommes pour qui ce trésor fut chanté

Hommes pour qui ce trésor fut gâché

XIII

Hommes réels pour qui le désespoir

Alimente le feu dévorant de l’espoir

Ouvrons ensemble le dernier bourgeon de l’avenir

XIV

Parias la mort la terre et la hideur

De nos ennemis ont la couleur

Monotone de notre nuit

Nous en aurons raison.

– 1938 –

LA VITTORIA DI GUERNICA

I

Bel mondo di tuguri

Di miniere e di campi

II

Visi buoni al fuoco visi buoni al freddo

Ai rifiuti alla notte agli insulti alla frusta

III

Visi buoni a tutto

Ecco il vuoto vi fissa

La vostra morte servirà d’esempio

IV

Morte cuore rovescio

V

Vi han fatto pagare il pane

Il cielo la terra l’acqua il sonno

E la miseria

Della vostra vita

VI

Dicevano di volere il buon accordo

Razionavano i forti giudicavano i pazzi

Facevano l’elemosina spartivano in due un soldo

Salutavano i cadaveri

Si colmavano di cortesie

VII

Perseverano esagerano non sono del nostro mondo

VIII

Le donne e i bimbi hanno lo stesso tesoro

Di primavera verde e latte puro

E di durata

Nei loro occhi puri

IX

Le donne e i bimbi hanno lo stesso tesoro

Negli occhi

Gli uomini come possono lo difendono

X

Le donne e i bimbi hanno negli occhi

Le stesse rose rosse

Mostra ognuno il suo sangue

XI

La paura e il coraggio di vivere e morire

Tanto difficile la morte tanto facile

XII

Uomini per cui questo tesoro fu cantato

Uomini per cui questo tesoro fu sprecato

XIII

Uomini reali cui la disperazione

Alimenta la fiamma divorante della speranza

Apriamo insieme l’ultima gemma dell’avvenire

XIV

Paria la morte la terra l’orrore

Dei nemic hanno il colore

Monotono della nostra notte

E noi li vinceremo.‎

(du recueil “Cours Naturel”)

http://www.antiwarsongs.org/canzone.php?id=5275&lang=


Commentaire littéraire

I. Peuple héros et victime

Le titre peut surprendre : ” Victoire ” étant ici utilisée antinomique (antithèse). C’est la victoire du peuple alors que c’est celle des Allemands. Ce poème n’a pas de ponctuation. Strophes hétérogènes : distique, tercet, quatrain, quintile donnent un rythme tantôt lent, tantôt haché qui traduit bien l’indignation d’Eluard.

1. Le beau monde et les valeurs morales

L’expression ” Beau monde ” est située en tête de vers : insiste sur la beauté du peuple. Il parle du monde ouvrier pauvre. Anaphore + parallélisme avec “visage bon”. Allitération en f : feu froid, condition difficile du peuple. Ce sont des gens qui peuvent tout encaisser : traités comme des bêtes qui assument des tâches difficiles. Strophe VIII et IX : peuple beau représenté par les femmes et les enfants. Enfant, pureté des femmes : source de vie : avenir et espoir mais en même temps fragile et inoffensif. “Vert” = espoir et ” lait ” = source pour vivre. Mise en valeur de leur pureté. Pause dans le poème. Toujours thème des yeux, le peuple a un visage, une beauté, une identité. Répétition des strophes. Ces quelques vers sur la nature : dans ce monde d’horreur, la nature est toujours belle.

Ainsi peuple déjà vulnérable mais il montre le courage de vivre.

2. L’injustice qui le frappe

La beauté, l’avenir, la douceur, pourtant il subit l’injustice et le mépris : vers 1, “Beau monde” s’oppose à “masure”. Injustice : privé de condition, de travail digne plus il supporte le froid etc. : des maîtres qui les accablent, ils sont des marginaux de la société et ils en sont exclus.

Strophes V : pain, aliment de base avec l’eau, le sommeil, on tire le peuple.

II. Les vainqueurs

1. Un ennemi sans visage

Face au peuple, on a des bourreaux, des ennemis sans identité désignés par ” ils ” dans la strophe V et dans le reste du texte : répété 8 fois. Ce sont des gens sans visage qui se masquent : l’inconnu utilise la peur. Quand on ne connaît pas l’ennemi, on ne sait pas à qui s’en prendre : pouvoir sans limites, pouvoir masqué  “disait” “désirait” “s’accabler de politesse” + vers 15 : antithèse.

2. Un ennemi hypocrite et monstrueux

Vers 14 hypocrisie ” rationnait “ donnait le strict minimum + ” jugeaient les fous ” impossible. Accumulation de verbes d’actions, ce qui traduit l’étendue de leur pouvoir. Hypocrisie et abus de pouvoir. A ce quintile succède une strophe à un vers pour résumer et prendre position. Verbe ” persévèrent ” utilisé à contre-emploi, on passe de ’imparfait = généralité + gradation des verbes à ” ils ne sont pas de notre monde “, ce sont des monstres.

III. La présence de la mort

1. L’obsession de la mort

Vers long traduit la mort : ils ne sèment que de la destruction et de la mort. Image de la mort dépouillée, presque obsessionnelle arrive par des phrases. Possessif strophe III montre le peuple, image du vide = néant physique et morale + sonorités du ” v “. Strophe IV ” la mort cœur renversé ” est une oxymore, ” mort et cœur ” exprime une impression de gâchis dû à la mort + image renversée fait penser au tableau de Picasso.

Strophe X ” rose rouge ” et” sang ” : mort qui a la couleur du sang image rose rouge qui est normalement la passion. Strophe IX X, espoir défait puisqu’il n’y a pas d’avenir : impression de gâchis car le trésor se transforme en sang : la réalité de la mort. Cette réalité aboutit à la XI. La fin revient de plus en plus à la réalité de la mort, une peur. Strophe XI il joue sur les antithèses. Thème de la mort s’agrandissant.

2. Le gâchis

Strophe XII “Hommes” en début de vers, impression de gâchis. Il rend hommage à un peuple qui a une identité. Strophe XIII mort de plus en plus présente. Il croit quand même en l’avenir + ” espoir ” image poétique avec le feu. Homme communiste qui a foi en l’homme + ” bourgeon ” avenir qui portera ses fruits.

 

Conclusion

Le poème La Victoire de Guernica de Paul Eluard a un titre quelque peu provocateur, ce qui exprime l’indignation du poète. Cependant il y a beaucoup de retenue dans ce poème, il exprime la douleur du peuple à qui va toute sa sympathie. Une telle prise de position vient d’une part de la générosité de l’homme, d’autre part de son communisme, enfin du surréalisme qui juste après la première guerre mondiale va affirmer sa révolte contre l’absurdité de la guerre. Quant à Guernica c’est le prélude aux horreurs nazies contre lesquelles Eluard s’élèvera à la résistance.

Merci à celui ou celle qui m’a envoyé cette analyse de La victoire de Guernica de Eluard.

http://bacdefrancais.net/guernica.php

Capitale de la douleur de Paul Eluard : Au cœur de mon amour …

Luigi Nono,Prometeo – Contrappunto dialettico alla mente …

Questa voce è stata pubblicata in cultura, documenti politici e contrassegnata con , . Contrassegna il permalink.