Albert Roussel : Symphony 3 – “Symphony No 4, Op 53” Karajan – Évocations

Roussel Albert

Charles Paul Marie

1869-1937

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Né à Tourcoing 5 avril 1869, mort à Royan 23 août 1937.

Compositeur.

Issu d’une famile d’industriels, il a un an à la mort de son père et huit à celle de sa mère. Son grand-père, Charles Roussel-Defontaine, maire de Tourcoing le recueille. À sa mort ce sera son oncle, Félix Réquillart, qui le prendra en charge. A l’âge de 15 ans, il entre au Collège Stanislas à Paris, passe le baccalauréat,prépare l’École Navale, où il est admis en 1887.

Il suit ses études sur le Borda, navire-école ancré à Brest. Enseigne de vaisseau, il parcourt les mers et fait de la musique pendant ses loisirs.

En 1892, il crée un Andante, Ave Maria pour cordes et orgue à l’église de la Trinité de Cherbourg.

Au retour d’une campagne il prend un long congé et s’installe à la fin de l’année 1893 à Roubaix dans sa famille.

Il suit des cours d’harmonie avec  Julien Koszul, directeur de l’École nationale de musique de Roubaix. Plus tard, à Paris, il travaille le piano, l’orgue, l’harmonie, le contrepoint et la fugue avec Eugène Gigout (1844-1925).

Il démissionne de la marine pour se consacrer à la musique et se fixe à Paris en octobre 1894.

En 1897 il présente, sous deux noms différents, 2 Madrigaux à 4 voix. au concours de la SACEM qui sont primés ex aequo. Il dirige leur exécution 1898 à la Salle Pleyel.

En 1898, il s’inscrit aux cours de composition et d’histoire de la musique de la Schola Cantorum. Il y suit les cours d’orchestration de Vincent d’Indy. De 1902 à 1914, il y assure les cours de contrepoint, et a comme élèves Ecik Satie, Edgard Varese (1883-1960), Roland-Manuel (1891-1966), Paul Le Flem (1881-1984).

En 1902 il est réformé de la marine pour des raisons de santé. En 1908 il épouse Blanche Preisach, et en 1909, voyage aux Indes et au Cambodge, qui lui inspirent les Évocations (1910-1911).

En 1912-1913, il compose le ballet le Festin de l’Araignée, une de ses œuvres les plus célèbres, sur un arguement. G. de Voisins, d’après  les Souvenirs entomologiques d’ Henri Fabre.
Le ballet est créé le 13 avril 1913, au théâtre des Arts de Paris. La même année, il en extrait Les Fragments symphoniques, créés en 1914.

En 1914 il s’engage dans l’armée de terre, en 1918 il s’installe à Perros-Guirec, achève Padmâvati commencé avant la guerre. En 1922 il achète une propriété en bord de mer à Varengeville

Composé en 1928, le Psaume LXXX est créé en 1929, année de son soixantième anniversaire.

En 1930 il assiste à la création aux États-Unis de sa 3e Symphonie par Koussevitzky.

Août 1936, il va se reposer à Royan à la suite d’une crise cardiaque.

Catalogue des oeuves

  • 1804-1906, [3] Rustiques, op. 5, pour le piano
  • 1897, 2 Madrigaux à 4 voix [inédit]
  • 1898, Des heures passent, op. 1 pour piano, Paris, Hamelle
  • 1902, 1 er Trio, op. 2, pour piano,  violon, violoncelle, Salabert (Rouart-L.)
  • 1903, 4 poèmes d’Henti de Régnier, op. 3 pour chant et piano [ Le Départ, Vou, Le jardin mouillé, Madrigal lyrique], Salabert (Rouart-L.)
  • 1903, Résurrection, op. 4, Prélude symphonique, Salabert (Rouart-L.)
  • 1904, Conte à la poupée, pour piano, album de la Schola Cantorum
  • 1904-1906, Le Poème de la Forêt (1ère Symphonie), op. 7, Salabert (Rouart-L.)
  • 1906, Divertissement, op. 6 pour flûte, hautbois, clarinette, basson, cor et piano, Salabert (Rouart-L.)
  • 1907, 2 poèmes chinois sur des poèmes de P. H. Roché op. 12 pour chant et piano [ Ode à un jeune gentilhomme ; Amoureux séparés], Salabert (Rouart-L.)
  • 1907, 4 poèmes d’Henri de Régnier, op. 8, pour chant et piano [ Adieux, Invocation, Nuit d’Automne, Odelette] Salabert (Rouart-L.)
  • 1907, La Menace sur un poème d’Henri de Régnier pour chant et piano, Salabert (Rouart-L.)
  • 1907-1908, 1ère Sonate piano et violon, op. 11, Paris, Salabert (Rouart-L.)
  • 1908, Flammes sur un poème de G. Jean-Aubry pour chant et piano, op. 10, Salabert (Rouart-L.)
  • 1908, Le Marchand de sable qui passe, op. 13 musique de scène pour l’oeuvre de G. Jean-Aubry, mus. de scène, création au Havre en 1908. Eschig [une Suite]
  • 1909-1910, Suite en fa dièse, op. 14 pour le piano, Paris, Salabert (Rouart-L.)
  • 1910-1912, Évocations, op. 15, texte de D. Calvocoressi, pour soli, choeurs et orchestre
  • 1912, Sonatine, op. 16, pour piano
  • 1912, Le Festin de l’Araignée, op. 17, ballet-pantomime sur un argument G. de Voisins), création au Théâtre des Arts de Paris en 1913 [Suite symphonique]
  • 1913, Petit canon perpétuel, pour piano
  • 1914-1918, Padmdvati, op. 18, opéra-ballet sur un livrei de Louis Laloy, créé à l’ Opéra de paris en 1923 [2 Suites]
  • 1918, 2 mélodies, op. 19 pour chant et piano [ Light de G. JeanAubry ; A Farewell d’E. Oliphant]
  • 1918-1921, 2ème Symphonie, op. 23, en si b
  • 1919, 2 mélodies op. 20 sur des poèmes de R. Chalupt pour chant et piano [ Sarabande, Le Bachelier de Salamanque]
  • 1919, Doute, pour piano
  • 1919, Impromptu op. 21, pour harpe
  • 1920, L’Accueil des Muses, pour piano (à la mémoire de Debussy)
  • 1920, Pour une Fête de Printemps, op. 22, pour orchestre
  • 1923, Madrigal aux Muses, op. 25, poème de Gentil Bernard, pour 3 voix féminines a capela
  • 1924, 2 Poèmes de Ronsard, op. 26 pour chant et piano [ Rossignol, mon mignon, Ciel, aer et vens]
  • 1924, 2ème Sonate pour piano et violon, op. 28
  • 1924, Joueurs de flûte, op. 27, pour flûte et piano
  • 1925, Duo pour basson et contrebasse (ou violoncelle)
  • 1925, Segovia op. 29, pour guitare ou piano
  • 1925, Sérénade, op. 30 pour flûte, violon, alto, violoncelle, harpe
  • 1926, Le Bardit des Francs, sur un poème de Chateaubriand, pour choeurs à 4 voix masculines a capela ou avec accompagnement de cuivres et batterie
  • 1926, Odes anacréontiques op. 31-32, sur de straductions de Leconte de Lisle [XIX Qu’il faut boire, XVI et XXVI Sur lui-même, XX et XXXIV Sur une jeune fille, XIV Sur un songe]
  • 1926, Suite en fa, op. 33, pour orchestre
  • 1926-1927, Concert pour petit orchestre, op. 34
  • 1927, 2 poèmes chinois op. 35 pour chant et piano sur des poèmces de P. H. Roché [ Des fleurs font une broderie, Réponsee d’une épouse sage]
  • 1927, Concerto pour piano et orchestre op. 36
  • 1927, L’Éventail de Jeanne, ballet en collaboration, créé à l’Opéra de Pazris en 1929, Heugel
  • 1927-1928, Vocalises pour chant et piano, Lemoine, Leduc
  • 1928, Aria (d’après la vocalise n° 2) pourpiano (ou orchestre) et solo (bois ou corde), Paris, Leduc
  • 1928, Psaume LXXX, op. 37, pour ténor, choeur et orchestre, Boston, Birchard ; Vienne, Universal Edition ; Paris, Fortin
  • 1928; harmonisation de O bon vin où as-tu crû ? chant populaire
  • 1929, 2ème Trio, op. 40 , pour flûte., alto, violoncelle
  • 1929, Petite Suite pour orchestre, op. 39
  • 1929, Prélude et Fughetta, op. 41, pour orgue
  • 1929-1930, 3ème Symphonie, op. 42, en sol mineur
  • 1930, Bacchus et Ariane, op. 43 ballet sur un argument de A. Hermant, créé à l’Opéra de Paris en 1931 [2 Suites]
  • 1931, 2 Idylles, op. 44, pour chant et piano sur une traduction de Leconte de Lisle [ Le Kerioklepte, Pan aimait Ekko]
  • 1931, A flower given to my daughter op. 44 pour chant et piano sur un poème de James Joyce
  • 1931-1332, Quatuor à cordes, op. 45
  • 1932, 2 poèmes chinois, op. 47 pour chant et piano sur des poèmes de P. H. Roché [ Favorite abandonnée, Vois de belles filles]
  • 1932-1933, Le Testament de la Tante Caroline, opéra bouffe sur un livret de Nino, créé en tchèque à Olmütz en 1936 ; ‘Opéra-Comique de Pzaris en 1937. Heugel [une Suite]
  • 1932-1934, Prélude et Fugue, op. 46, pour piano (hommage à Bach)
  • 1933, 2 mélodies op. 50  pour chant et piano sdes poèmes de R. Chalupt [ Cour en péril, L’heure du retour]
  • 1933, 3 Pièces, pour piano, op. 49
  • 1934, Andante et Scherzo, op. 51, Pour flûte et piano
  • 1934, Pipe in D major, pour pipeau et piano, Paris, L’Oiseau-Lyre
  • 1934, Sinfonietta pour orchestre à cordes, op. 52 (1934) : 4` Symphonie, op. 53, en la mai. (1934)
  • 1935, 2 mélodies, op. 55 pour chant et piano sur des poèmes de G. Ville [ Vieilles cartes, Si quelquefois tu pleures]
  • 1935,  Aeneas, op. 54, ballet avec choeurs sur un argument de J. Weterings, créé à Bruxelles en 1935
  • 1936, Concertino pour violoncelle et orchestre op. 57
  • 1936, Prélude du 2ème acte de 14 Juillet du drame de Romain Rolland, créé en 1936. Chant du Monde
  • 1936, Rapsodie flamande, op. 56
  • 1937, Andante du Trio inachevé, pour hautbois, clarinette, basson, dans in RM, nov. 1937
  • 1937, 3e Trio, op. 58, pour violon, alto, violoncelle
  • sd., Elpénor, op. 59, poème radiophonique pour flûte et quatuor à cordes
  • sd., Jazz dans la nuit, op. 38 pour chant et piano sur un poème de R. Dommange

Bibliographie

  • Albert Roussel (1869-1937), cinquantenaire. Dans « La Revue musicale », Paris 1987, p. 103-110]Colloque international Albert Roussel (1987 ; Lyon / Saint-Etienne). Albert Roussel  : musique et esthétique : actes du Colloque international Albert Roussel (1869-1937), Lyon, Saint-Etienne, 12-14 novembre 1987 ; organisé par le CERMIM, Centre d’études et de recherches sur la musique, l’informatique musicale et les medias, et le CIEREC, Centre interdisciplinaire d’études et de recherches sur l’expression contemporaine… textes réunis et édités par Manfred Kelkel. Paris, J. Vrin, 1989
  • Albert Roussel. Paris, Salabert, 1993 [12 p..]
  • BOUJU CAROLINE et PAZDRO MICHEL, Albert Roussel. École normale de musique, Sacem, Paris : Actes Sud-Papiers, v. 1987
  •   Catalogue de l’oeuvre d’Albert Roussel, Paris, 1947.
  • KELKEL MANFRED (dir.),  Albert Roussel : Musique et esthétique « Musique et esthétique », Vrin, Paris 1989 [352 p. ]
  • LABELLE NICOLE, Catalogue raisonné de l’oeuvre d’Albert Roussel. Musicologica neolovaniensia. Studia (6) Louvain-la-Neuve, Collège Erasme, 1992 [XII-159 p.]
  • LANDORMY PAUL, Albert Roussel, 1869-1937. Suivi d’un : Hommage à Albert Roussel, poème de René Chalupt. Introduction de Gabriel Astruc. Paris, Draeger, 8 juin 1938 [In-8 °, 14 p. n. ch., figure, portraits, musique]
  • LESURE FRANÇOIS, A lbert Roussel, (1869-1937)… Catalogue… Paris, Bibliothèque nationale l969
  • MILLER CATHERINE, Albert Roussel (1869-1937), mélodiste. René Chalupt (1885-1957), poète et critique. Analyse musico-littéraire de mélodies de Roussel sur des poèmes de Chalupt. Faculté de Philosophie et Lettres . Département d’Histoire de l’Art et Archéologie, Louvain-la-Neuve, 1998.
  • ROUSSEL ALBERT (1869-1937), Le Carnet de bord: 1889-1890. Pésentation-analyse, Daniel Kawka. Saint-Etienne : CIEREC, Centre interdisciplinaire d’études et de recherches sur l’expression contemporaine, 1987. [207 p.]
  • ROUSSEL ALBERT (1869-1937), Lettres et écrits. Textes réunis, présentés et annotés par Nicole Labelle. Harmoniques : Série Ecrits de musiciens, Paris, Flammarion, 1987. [361 p.]
  • SURCHAMP DOM ANGELICO, Albert Roussel : l’homme et son œuvre. « Les «Les introuvables – Musiciens de tous les temps », Seghers, Paris 1937 , 1967, p. 37
  • TOP DAMIEN, Albert Roussel. Carré musique, Séguier, septembre 2000
  • VUILLEMIN LOUIS, Albert Roussel et son oeuvre. Poitiers, Société française d’imprimerie, Pris, Drand, 1924 [123 p.]

Documents

l’Hommage de Paul Landormy à Albert Roussel (1938)
Voir bibliographie

Élève du Collège Stanislas à Paris, il se prépara aux examens de l’École Navale. A 18 ans, il entrait au Borda.

Comme enseigne de vaisseau, Albert Roussel faisait, quelques années plus tard, le voyage de Cochinchine à bord de la canonnière cuirassée Le Styx.

En 1894, à 25 ans, il démissionnait pour se livrer entièrement à la musique. Il demandait des conseils d’abord à des professeurs de Roubaix, puis à l’organiste Gigoux. Enfin, en 1898, il entrait à la Schola Cantorum où il travaillait jusqu’en 1907 avec Vincent d’Indy.

A son maître, il ne ressemblait point à tous égards. Il n’en avait pas l’âme romantique. Mais il apprit de lui le culte de la forme, des vastes architectures sonores, des constructions solides et bien équilibrées. Seulement, ce qui est singulier, c’est que cet art de la sévère logique musicale il l’appliquait à exprimer des images et des émotions qui, souvent, sont celles d’un impressionniste. Albert Roussel est quelque chose comme un Debussy formé à l’école du contrepoint. Rien de plus curieux ni de plus savoureux que le contraste perpétuel entre une sensibilité très vive, très mobile, une imagination très fantaisiste et la rigidité des cadres dans lesquels l’une et l’autre s’expriment.

Ainsi le voulait Albert Roussel, par le fait même de son éducation première, mais aussi sans doute par le fait de sa nature complexe qui associait des contraires, qui s’attachait avec autant d’ardeur à la construction des belles lignes d’un vaste ensemble et à la recherche de la sensation rare, d’un accord étrange, d’un rapprochement de timbres inédit, d’un effet de couleur saisissant.

Albert Roussel se présente à la fois comme un constructeur d’édifices spacieux aux nobles proportions et comme un peintre ou un poète minutieusement appliqué à la notation des infiniment petits du sentiment et du rêve.

Il y a en lui du Loti et du Proust.

Dans ses dernières années, son style se dépouille et il aboutit à une sorte de néo-classicisme qui fait peu de part à l’évocation du réel : musique pure dans toute sa rigueur.

L’impression qui se dégage de la considération des oeuvres d’Albert Roussel est d’ailleurs celle d’une étonnante diversité. Toujours à l’affût, c’est par excellence le chasseur d’imprévu. Félicitons-nous des joies variées que nous vaut cette noble inquiétude.

Les oeuvres de jeunesse, le Trio op. 2, la Sonate piano et violon op. 11, sont écrites dans les cadres où s’enfermait volontiers d’Indy. Longs développements, vastes architectures. Roussel s’exercera plus tard à condenser sa pensée, à « faire court ». Mais on ne saurait négliger ces premières oeuvres si robustes, si fortes et d’un parfum si pénétrant. Il faudrait au moins ne point délaisser cette belle Suite pour piano op. 14 et son Prélude fantastique, hallucinant avec sa basse obstinée, d’un caractère si farouche et si dur, sa gracieuse Sicilienne, son entraînante Bourrée, sa Ronde finale endiablée.

Dans le domaine de la musique de chambre, notons avec quel bonheur Albert Roussel écrit pour la flûte. Rappelons ses quatre pièces intitulées : Pan, Tityre, Krishna, M. de la Péjaudie, – cette dernière surtout dont l’élégance et la passion surannée s’enrubannent ironiquement d’exquises broderies.

Pour la flûte encore, pour la flûte à laquelle s’adjoignent violon, alto, violoncelle et harpe, cette Sérénade (1925) qui s’impose d’emblée par les qualités les plus séduisantes. Il y a dans ces pages une poésie d’une douceur qui enchante. Dans l’Andante, notamment, sorte de nocturne d’un sentiment extrêmement délicat, le chant de la flûte s’élève à une hauteur, à une noblesse, à une grandeur que l’auteur de cette pièce si émouvante n’a peut-être jamais dépassées.

Et que dire encore de l’exquis Trio pour flûte, alto et violoncelle ?

Dans le cadre intime de la musique de chambre, Albert Roussel a encore écrit la Sonatine pour piano op. 16, un magnifique Quatuor à cordes, et tout cet extraordinaire bouquet de mélodies le Départ, le Bachelier de Salamanque, l’Ode à un jeune gentilhomme, Réponse d’une épouse sage, etc., etc., qui comptent parmi les fleurs les plus précieuses du jardin de la musique française.

Dans le domaine de la musique symphonique, Albert Roussel a su se faire la place de premier plan qui était due à sa maîtrise.

Son Poème de la Forêt, ses Évocations, sa Fête de Printemps, sa Suite en fa, ses quatre Symphonies, sa Rhapsodie flamande comptent parmi les plus belles productions de l’École française. Il faut y joindre le délicieux Festin de l’Araignée, primitivement ballet, bientôt suite symphonique.

Détachons de cet ensemble imposant, pour les considérer un moment à part, ces si curieuses Evocations qui furent inspirées à Roussel par le voyage qu’il fit en Indo-Chine en 1909 pour renouveler ses impressions de jeunesse. Les titres des 3 parties parlent d’eux-mêmes à l’imagination : I. Les Dieux dans l’ombre des Cavernes. – II. La Ville rose. – III. Aux bords du fleuve sacré.

C’est d’un art extrêmement complexe, où l’on peut démêler bien des éléments divers. D’abord on en admire, surtout dans la  première partie, la belle ordonnance, le développement savamment étudié, la majestueuse distribution des thèmes, des tonalités, des valeurs. Il y a là comme un ressouvenir du Maître dont Roussel fut le disciple, de Vincent d’Indy. Mais si l’on considère surtout la qualité et la signification des thèmes et tout ce qu’ils évoquent, on aperçoit d’importantes différences. De ces deux grands paysagistes, Vincent d’Indy et Roussel, le second a une sensibilité beaucoup plus subtile et plus diverse. D’Indy s’en tient à sa terre de France qu’il aime d’un amour profond et dont il traduit la nature intime avec une poésie intense. Il n’est nullement soucieux d’exotisme, ni d’aucune sorte de sensation rare. Mais avec quelle force pénétrante il rend le sentiment qui l’attache à son Vivarais ! Albert Roussel est toujours en quête de quelque émotion nouvelle qu’il ira chercher jusqu’aux Indes, s’il le faut. Son âme de marin vogue toujours sur les océans du rêve, en désir de quelque ailleurs non encore atteint. Il ne se repose pas dans l’amour du foyer et des lieux familiers. Il part toujours en quelque lointain voyage, fût-ce d’imagination. Ses rêves sont splendides de couleur et de volupté.

Ce ne sont pas seulement de merveilleux paysages que l’art d’Albert Roussel excelle à évoquer, ce sont aussi de séduisants spectacles de danse. La danse l’attire et le retient. Il a une prédilection pour les rythmes les plus capricieux qu’il note avec une attention émue. Il se montre extraordinairement sensible à ce genre de volupté et nous le fait éprouver à notre tour.

Un voluptueux peut-être, avant tout, semble-t-il. Et il n’est point de caractère qui le distingue davantage de Vincent d’Indy, ardent, passionné, certes, mais dont le romantisme s’oriente davantage vers les régions de l’idéal.

Jusqu’en 1923, Albert Roussel n’avait point encore écrit pour le théâtre, sinon ce charmant ballet : Le Festin de l’Araignée. On le connaissait surtout comme symphoniste. On se demandait comment son talent s’accommoderait d’une action dramatique. Louis Laloy lui fournit le livret d’un opéra-ballet en 2 actes dont le sujet est fort simple. Un roi mogol du XIIIe siècle aime la femme d’un roi hindou. Il assiège la ville et le palais. Il est vainqueur : mais en vain. Car Padmavâti a tué son époux qui voulait la persuader de se livrer au roi mogol pour sauver la cité, et elle est, après cela, montée elle-même sur le bûcher des veuves. Sujet simple, mais violemment tragique et relevé d’une foule de divertissements chorégraphiques. De ce sujet et de cette formule de l’opéra-ballet, tel que l’avait conçu Campra au XVIIIe siècle, Albert Roussel tira le meilleur parti. Sa musique est d’une sonorité prenante, d’une couleur singulière qui étonne et ravit, d’une sensibilité très fine et très aiguisée. Elle charme et elle torture par ses rythmes obsédante et toutes les images qu’elle évoque. Œuvre d’un grand musicien. Padmavâti, montée somptueusement par les soins de M. Jacques Rouché fut en même temps un spectacle captivant.

Il y aurait tant à dire encore de la Naissance de la Lyre, de Bacchus et Ariane, d’Æneas.

Je ne veux plus citer qu’un ouvrage d’Albert Roussel, le Psaume LXXX, ouvrage capital dont l’orchestre Pasdeloup et les chaeurs de la Concordia de Mulhouse sous la direction de M. Strubin ont donné récemment une magnifique exécution au Théâtre des Champs-Elysées.

Le monde entier a reconnu les hautes vertus de cet art d’Albert Roussel, art essentiellement jeune et qui a toutes les sympathies des jeunes parce que l’esprit et le coeur de Roussel sont restés perpétuellement ouverte à toutes les nouveautés. En lui nulle trace de tendances conservatrices. Se renouvelant sans cesse luimême, il suivait avec une sympathie généreuse les essais les plus audacieux de ses cadets. Comme il ne redoutait pas leur montée progressive au succès, et comme il ne faisait rien pour l’enrayer, on ne lui en voulait pas non plus d’être parvenu, par des moyens d’ailleurs si probes, à la gloire.

Il y maintint constamment la même attitude modeste et réservée. On aimait l’homme, loyal, désintéressé, scrupuleusement honnête et bon, qui faisait davantage encore apprécier l’artiste.

Il repose maintenant dans le petit cimetière de Varengeville, près de son beau domaine de Vastérival, en face la mer, qu’il aima tant, en face du large et des horizons vastes où se perdaient naguère sa pensée et son rêve.

Jean-Marc Warszawski

https://www.musicologie.org/Biographies/r/roussel_albert.html

Symphony No. 3

Albert Roussel

Roussel: Symphony No. 3

Composed: 1929-1930
Length: c. 23 minutes
Orchestration: 3 flutes (2nd and 3rd = piccolo), 2 oboes, English horn, 2 clarinets, bass clarinet, 3 bassoons, contrabassoon, 4 horns, 4 trumpets, 3 trombones, tuba, timpani, percussion (bass drum, cymbals, snare drum, tam-tam, tambourine), 2 harps, celesta, and strings
First Los Angeles Philharmonic performance: January 19, 1950, Alfred Wallenstein conducting

Albert Roussel’s Third Symphony stands out as one of the most successful of Serge Koussevitzky’s 99 premieres with the Boston Symphony Orchestra. (Joining Roussel as part of the 1930 celebration of the orchestra’s 50th anniversary were Stravinsky’s Symphony of Psalms, Howard Hanson’s Romantic Symphony, Copland’s Symphonic Ode, and Prokofiev’s Symphony No. 4.) Part of the attraction of this work is its timbral charm: the standard orchestra is decorated with enhanced percussion, including tam-tam, celesta, and two harps. Another is its compressed drama: within the duration of an 18th-century Mozart symphony lies the emotional intensity of his 19th-century Romantic successors.

From the beginning, the listener understands this is no minor trifle – certainly no evidence for Mersenne’s claim about the absence of the “passion” in French music. Here, in fact, Mersenne’s metaphorical “accents of passion” become literal, as Roussel introduces a syncopated tune with a brittle quality reminiscent of Stravinsky or Prokofiev (the latter a friend of Roussel’s who greatly admired this work). Floating passages featuring solo woodwinds alternate with the first idea; the exaggerated contrast between these two extremes reinforces the size of the dramatic frame – so that when we reach the climax it feels proportionate even within its condensed time frame.

The slightly more expansive second movement reminds us that Roussel’s contemporaries were exploring the cinematic techniques of structure, character, and setting: it begins with atmospheric solo woodwinds, builds to a sweeping melody at home in a screen drama, follows a violin solo to a more animated section, and finally broadens out to a huge climax. The scherzo plays on a conventional idea of a dance; its use of the tambourine moves us south and reminds us of the ongoing French fascination with all things Spanish. The finale is an essay in orchestral color. Roussel calls on the hard-working woodwinds to get the game going, first rounding up strings, then brass into a cheerful romp. The movement is marked “con spirito” – an apt description of a movement that begins with the nimbleness of youth and keeps the spring in its step even as it acquires the weight and substance of the prime of life. As Francis Poulenc put it: “It is really marvelous to combine so much springtime and maturity.”

— Susan Key is a musicologist specializing in 20th-century American music.

http://hollywoodbowl.org/philpedia/music/symphony-no-3-albert-roussel

Symphony No. 4 in A major, Op. 53 | Details | AllMusic

Albert Roussel: Le Festin de l’araignée, op.17 Toscanini – Denève – Guido Ennio Molinari

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