HA #15 – L’ANGE IVRE (YOIDORE TENSHI, 醉いどれ天使) (1948) Akira Kurosawa

Une histoire de yakuzas post-Seconde Guerre Mondiale, émouvante et intelligente

Avis sur L’Ange ivre

Mon analyse sur YouTube : https://www.youtube.com/watch?v=48cCLypd9nM

L’Ange Ivre, c’est l’histoire de Sanada (joué par le grand Takashi Shimura), qui exerce la profession de médecin, il travaille dans un bidonville de Tokyo (sous fond de misère et d’insalubrité, et même d’insécurité, le marché noir bat son plein, il fait une chaleur peu supportable amenant des moustiques, et une marre est situé au milieu de ce quartier, les habitants y jettent même leurs détritus). L’intrigue se déroule à l’époque de l’après-2nde Guerre Mondiale, le scénario est contemporain de sa sortie en salles. Notons que, et c’est important, Sanada a un penchant pour la bouteille. Un soir, un jeune voyou nommé Matsunaga (joué par l’illustre Toshiro Mifune) arrive chez lui car il a été touché par balle (il s’avère que c’est un jeune Yakuza, un mafieux japonais), notre docteur le soigne sans anesthésie tout en lui expliquant que le mal, c’est mal, faut pas boire, etc. Ça va même plus loin que ça, car Sanada découvre que Matsunaga est également atteint de tuberculose. Sauf que le jeune homme ne veut rien entendre et refuse de se faire soigner. Ceci déclenchera une suite de péripéties et d’embrouilles entre le vieux colérique, bourru et alcoolique (mais tout de même sage) médecin et le jeune gangster désinvolte. Sanada va même se lier d’amitié avec Matsunaga, avec sa gueule d’ange. L’opposition de ces deux hommes sera l’un des fils conducteurs du scénario, une sorte de relation maître-disciple, ou le maître a du mal à être maître, et le disciple a du mal à être discipliné. Ils se valoriseront mutuellement avec un échange très violent, mais aussi très inégal, l’un frappe, l’autre renvoi, avec un point en commun : ils sont tous les deux têtus.

D’ailleurs, les deux sont portés sur la bouteille, tant qu’à faire, donc en fait, ils ont plus de points en commun qu’on ne le croit primairement, on peut même supposer que Matsunaga rappelle la jeunesse du Docteur.
Ayant vu ce film il n’y a pas si longtemps, j’ai pu décerner la pâte de Kurosawa en termes de réalisation, tout en remarquant des similitudes avec des films américains de l’époque (notamment pour l’utilisation de la musique, qui n’est pas utilisée de la même manière que le reste de sa filmographie), ainsi que la présence de Toshiro Mifune et Takashi Shimura. Kurosawa utilise des cadrages vieux comme le monde avec la caméra qui penche pour exprimer une notion de vertige, de déséquilibre, et ça marche très bien, surtout avec la situation de fin. On remarque aussi un jeu de composition entre Shimura et Mifune qui se renvoient la balle comme dans une partie de ping pong, ce qui rend leur relation captivante. Mais développons ces points-là.
Il y a deux éléments qui laissent leur emprunte dans le film, et qui sont tout bêtement les promesses de Kurosawa vis-à-vis du spectateur : l’alcool et la mare dégueulasse. Le film s’ouvre même sur cette mare, et ça signifie beaucoup de choses. L’alcool, ou la bouteille d’alcool hein, vous avez compris le principe, est un objet capital du film, on retrouve cet élément dans beaucoup de scènes et ça a véritablement son importance, principalement parce que nos deux personnages boivent beaucoup pour oublier leurs soucis, même s’ils ne partagent pas les mêmes problèmes. Mais pas seulement, c’est aussi une métaphore du contexte politique et social du Japon, que ce soit à Tokyo (le lieu de l’intrigue) ou autour. Ce qu’il s’est passé à la fin de la guerre au Japon, dans le sens figuré, et bien c’était une monumentale gueule de bois. Plus la gueule de bois se dissipait, plus la population sur l’archipel s’est rendue compte des morts, des atrocités, des destructions, etc. Au Japon comme ailleurs, on s’est rendu compte que l’Homme était capable d’agir comme un monstre, sans foi ni loi, et ça a marqué un bon paquet de japonais (et pas que), les séquelles ont été très difficile à refermer. Si on revient sur nos deux personnages principaux, ou plutôt aux acteurs campant ces personnages, Mifune était photographe durant la 2nde Guerre mondiale (il a pu voir la barbarie de ses propres yeux) et Shimura jouait des pièces de théâtre (mais a été mis en prison quelques temps car il était interdit d’exercer certaines professions sans autorisation, dû à la censure). Nos deux hommes ont vus et vécus des choses assez traumatisantes (pas que eux évidemment, mais là on s’intéresse à ce qu’ils représentent). Les personnages qu’ils jouent évoquent et symbolisent ce lendemain douloureux, ou revenir à la vie de tous les jours devenait compliqué, l’alcool étant souvent une boisson consommée par des personnes voulant oublier, oublier l’injustice, oublier la maladie (qui est le cas notre pauvre yakuza), oublier la pauvreté, oublier la frustration, des thèmes qu’on retrouve dans ce film et qui étaient présent à la fin de la Guerre. Et au-delà de leurs problèmes respectifs, nos deux héros vont s’aider, bizarrement, mais cette relation est absolument touchante, les mots sont forts de sens, personnellement, j’ai été très ému et totalement pris dans cette histoire grâce à cette amitié tellement particulière, qui est tout sauf incompréhensible. Pour vous parler encore de métaphore : Le médecin retire une balle du corps de Matsunaga, remarquant ainsi la tuberculose. Dr Sanada tente de soigner cette maladie, il la traque et cherche à trouver l’origine de cette tuberculose, parallèlement, il tente de soigner, comme d’autres, un mal psychologique (et sanitaire, #bombes nucléaires) ancré dans la société. On y voit un combat contre le gangstérisme, la voyoucratie et la politique corrompue qui appliquent illégalement leurs lois.

Sanada est à l’image du réalisateur Kurosawa : comme tout bon médecin, il veut absolument soigner le jeune Matsunaga, son but est clair et précis, et à travers cette guérison, il tente au sens figuré comme au sens propre à éradiquer ce mal engendré par les yakuzas (on peut même y voir une représentation de ce système mafieux avec la mare remplie de bacilles, qui représente aussi les maux de la société, l’alcool évidemment fortement montré, la lâcheté, le mensonge, la corruption en plus des comportements de soumission qui risquent de conduire au moment du film le Japon à sa perte, car ce peuple renaissait de ces cendres, mais étaient tombés aux mains des yakuzas, cette mare représente aussi la maladie qui pourrit l’intérieur de Matsunaga), sans oublier que Sanada tente d’éradiquer aussi son propre problème d’alcool. Tout ça pour dire que notre toubib lutte contre la défaite, il est rempli d’espoir au fond de lui. Il tente aussi de montrer qu’il faut se souder d’abord pour mieux guérir de ce lendemain de Guerre, ensuite pour lutter contre l’injustice de la mafia japonaise et d’autres voyous. Pour parler d’allégorie, et pour revenir sur cette marre, on peut apercevoir une fleur qui est synonyme d’espoir (ce qui rappelle aussi le travail très esthétique de Yasujiro Ozu). Espoir aussi représenté par des sourires et des musiques de dance. On sent aussi une influence de Shakespeare et Dostoïevski, avec la relation des deux personnages principaux qui jouent le jeu de « suis moi je te fuis, fuis moi je te suis », ainsi que le destin tragique de Matsunaga, du à sa condition de gangster, et à sa tuberculose. Et ce genre de récit est assez courant, avec une histoire assez simpliste au début avec le coup du mec bourré qui devient malade, le toubib (faisant office de mentor) veut le soigner mais l’autre veut pas, etc., cependant, Kurosawa a le génie pour rendre intéressant son film et de le contextualiser. Mais ne vous y trompez pas, c’est un scénario original dans le sens ou le film n’est pas adapté d’un fait historique (sauf pour le contexte évidemment), ni d’un livre ou quelconque support médiatique. Outre les inspirations littéraires, on reconnaît aussi dans la narration et le style des traits du théâtre Nô (avec le maquillage de Mifune quand il est malade par exemple).
Quant à la réalisation, et bien, sans être excellente, faut quand même avouer qu’il en avait dans le gilet Akira ! Il mêle plans fixes, travellings, caméra penchée pour exprimer une notion de vertige, fondus, surexposition de deux séquences en même temps… Chaque utilisation stylistique et narrative justifie le propos en question, même si, et là je chipote, Kurosawa cherche un peu ce qui deviendra son propre style narratif. Les plans fixes exposent les émotions des personnages, avec des inserts et des gros plans qui captent parfaitement la tension de la situation, notamment les gros plans sur Toshiro Mifune qui fut remarquable de crédibilité, les travellings suivent avec intérêt le déroulement de scènes comme le duel aux couteaux (en plus d’un montage très efficace), la chanteuse avec ces zooms presque délirants (en parallèle à Matsunaga qui est bourré à ce moment-là) et la fin avec notre médecin qui va au marché (fin quasi néo-réaliste), et le vertige exprimé lors de ce même duel aux couteaux, sans oublier l’utilisation de la lumière très iconique, encore une fois je vous renvoie aux gros plans sur Mifune et aussi de manière générale, les scènes nocturnes ou la lumière n’est pas utilisée par hasard, ce qui donne au final une belle photographie.
Le petit point négatif selon moi est le rythme du film. Les 30-35 premières minutes du film semblent s’éterniser un peu, c’est essentiel pour présenter la situation, mais comme Kurosawa n’a pas développé à fond les personnages, on aurait pu raccourcir cette première partie, seulement, si on prend du recul, on pourrait se demander si le suspense n’aurait pas été le même par rapport au destin de Matsunaga. Il est donc évident comme n’importe quel film qu’il faut accepter ce début que j’ai trouvé personnellement un petit peu long. L’installation permet de capter l’attention du spectateur, et attention, je ne dis que j’ai besoin d’être tenu par la main pour tout comprendre, bien au contraire. Donc il faut au moins se concentrer sur la lecture de nos deux personnages principaux pour voir leur évolution, que l’on aime ou pas le temps que ça prend.
Toshiro Mifune a un jeu plus souple que dans ces futurs projets, il arrive déjà à poser sa posture et sa voix, il possédait un sacré body language, une façon de s’exprimer avec son corps absolument fascinante. Kurosawa a parfaitement su diriger cet acteur, qui avait ce côté bestiale, qui mêle à la fois fierté et tristesse. Et c’est quasiment un fait, Mifune avait un charisme de fou ! Mais ayant vu L’Ange Ivre (titre très poétique en fait) avec des personnes pas très fan de ce genre de film et du jeu d’acteur de Mifune, j’ai souvent entendu des critiques à propos de son jeu qui parait exagéré. Il faut mettre en avant deux choses pour expliquer pourquoi je considère que le jeu de Toshiro Mifune était juste, et qu’en plus, il jouait formidablement bien, dans ce film et les suivants. Premièrement, il avait une palette de jeu complète, il a joué des rôles sombres, joyeux, terrifiants, colériques, drôles, etc., il a montré énormément de facettes durant sa carrière de comédien, mais à aucun moment je n’ai trouvé qu’il en faisait trop. Naturellement, on sentait qu’il dégageait une très grande énergie dans ces personnages, il s’investissait énormément en plus d’avoir un visage incroyablement marquant, il savait mêler la subtilité de son jeu d’acteur pour amuser ou apeurer le spectateur, et sa gestuelle affichait quelque chose de puissant, c’est évidemment subjectif de parler de jeu d’acteur car il n’y a pas de science exacte pour mesurer la performance d’un comédien, il n’y a pas de formule parfaite pour définir des émotions, mais selon moi, Mifune était capable de jouer tous les rôles possibles car il pouvait investir son envie de jouer à travers ses personnages, y compris dans L’Ange Ivre ou il mixe à la fois détermination et pitié. Autre chose pour parler de son expression très brutale parfois, faut pas oublier que la langue japonaise n’utilise pas les mêmes intonations que les langues européennes. Quand vous vous exprimez en français ou en anglais par exemple, vous montez le ton ou vous accentuez des mots ou des syllabes dans vos phrases et vos questions, et notre vocabulaire permet de nous distinguer de langues bien différentes. Le japonais (la personne japonaise hein) aussi, mais très différemment, il prononcera des choses que nous ne prononçons pas d’habitude, et vice-versa, et leur accentuation suit d’autres règles que les nôtres. Ainsi, écouter des comédiens japonais peut donner une impression particulière quand on n’est pas habitué aux comédiens orientaux. Sans oublier l’accent qui ajoute cette impression de décalage avec nous. Ainsi, Mifune, en plus d’être charismatique et d’utiliser magnifiquement son corps, est un digne représentant de la performance d’acteur au Japon. Ainsi, selon moi, Toshiro Mifune joue très bien dans cette œuvre. En face Takashi Shimura lui renvoie l’appareil avec une composition assez théâtrale mais aussi assez libre, il dégage à la fois un caractère sec et brutal, mais aussi une tendresse qui nous donnerait presque envie de le câliner comme un gentil petit nounours. Et forcément, on a une opposition intéressante entre un vieil homme inquiet et un jeune homme insouciant, inconscient et presque puéril. Et bon sang, quel duo ! Kurosawa a prouvé qu’il était un formidable directeur d’acteurs. D’abord, dans le sens littéral car les acteurs ne se déplaçaient pas n’importe comment, tout semble clair dans leurs mouvements, mais aussi parce que le réalisateur a su laisser le champ libre pour que Shimura et surtout Mifune puissent s’exprimer en habitant leur personnage respectif. On se prend d’intérêt pour Matsunaga alors qu’il n’est pas LE personnage principal, il partage cette position avec Sanada. A la base, Takashi Shimura devait être le personnage principal, et l’histoire avec le jeune yakuza ne devait pas être aussi développée. C’est parce que Mifune était tellement impressionnant dans son rôle que Kurosawa a changé son scénario pour laisser plus de liberté à son futur acteur fétiche. Il dira même : “Avec la performance de Toshiro Mifune dans le rôle du gangster, c’est le premier film dans lequel mon idée originale a été complètement bouleversée. La performance de Takashi Shimura dans le rôle du docteur était excellente mais impossible de passer à côté de la force naturelle de la performance de Mifune. Comme le titre l’indique, c’est le docteur qui était supposé être le héros du film. Mais il aurait été honteux de tenter de restreindre la vitalité de Mifune…” Je n’aurais pas dit mieux. C’est pour ça que le titre désigne le Docteur, car il est ivre, mais il est considéré comme un ange, car il tente de sauver un criminel. C’est lui l’ange, la confusion est compréhensible, donc il est primordial de le signaler, c’est un ange qui veux protéger son entourage, sans parler de son métier, comme lors de la scène où il demande aux enfants de s’éloigner de cette fameuse mare, au risque pour eux d’avoir le typhus. Puis le brave bonhomme fait preuve d’attention avec un enfant qui vient récupérer son chapeau. Et les dialogues, mon dieu, sont remplis de sens, ils sont d’une grande intelligence et d’une grande maturité. Par exemple, le médecin dit à Matsunaga: « Aime-moi, je suis moche mais je te soignerai gratuitement » tellement de profondeur et de vérité dans ces mots, phrase quasi poétique qui reflète aussi le problème du système de santé au Japon à l’époque, Sanada ferait presque office de mécène en disant ça.
A travers la relation Sanada/Matsunaga, pleine de respect et d’empathie finalement malgré le comportement de chacun parfois, s’affiche surtout un portrait social saisissant qui donne tout son crédit à la démarche de Kurosawa. Le personnage du médecin sera d’ailleurs exploité plus tard avec une écriture similaire dans Barberousse, joué tient donc par Mifune. Akira Kurosawa n’approfondissait pas à fond l’écriture de ces personnages, il se contentait de l’essentiel, sans chercher à comprendre le comment du pourquoi de chacun, le passé de tel ou tel personnage, il savait qu’il fallait passer par l’image pour raconter son histoire. Dès le départ, par ses hésitations et sa violence un peu trop accentuée, on veut que le jeune mafieux soit guéri, pourtant il a le profil du vilain au fond du trou. S’il écoutait le docteur, il se soignerait correctement. Mais on se rend compte que les enjeux sont plus compliqués ; même si on lui interdit de boire de l’alcool, il le fait quand même car il veut rester un yakuza. Son destin est assez devinable, car c’est un yakuza, dans ce milieu, rien n’est bien sûr, il est atteint de la tuberculose, on parle d’un autre yakuza qui va sortir de prison (tu la sens la querelle qui arrive), et quelques petits éléments qui peuvent donner une réponse au destin du jeune homme. L’écriture de Matsunaga est très intéressante, car ce jeune homme se trouve dans une situation indélicate, cherchant sa liberté tout en ayant une faiblesse en lui, sa maladie. Son destin est visible aussi dans un cauchemar quand il ouvre sur une plage un cercueil ou il retrouve un autre lui. Ce même cauchemar montre aussi sa peur, tout simplement. N’oublions pas les personnages secondaires servant de « relais » sont formidablement interprétés aussi, comme Okada joué par Reisaburo Yamamoto , Miyo l’infirmière jouée par Chieko Nakakita et j’en passe, tout cela prouve bien la bonne direction artistique du long-métrage. Notons que les personnages principaux ne sont pas nés par magie de l’imagination de Akira Kurosawa (qui a co-scénarisé le film aussi) et de Keinosuke Uegusa (l’autre co-scénariste), car Uegusa avait rencontré un jeune chef de la mafia alors qu’il enquêtait sur le milieu des trafiquants de drogue, tandis que l’inspiration du Docteur vient d’un vieux toubib alcoolique croisé par Kurosawa lors de repérages pour le tournage, et qui exerçait en plus clandestinement.
On a une musique marquante de Fumio Hayasaka, très mélancolique, qui accompagne très bien l’ambiance du film, sans écrasé le propos, sauf à la fin ou elle envahit presque l’image, comme les films américains de l’époque. Même le joueur de mandoline dans le film a son importance narrative, annonçant un élément de l’histoire, il fait office de messager de la mort, en tout cas que quelque chose va se passer, prévisible quand même vu la déchéance de Matsunaga.

L’issue de l’histoire sera tragique au milieux de la violence et l’injustice de la pègre japonaise, avec l’assassinat du jeune Matsunaga, à la suite d’un duel aux couteaux, qui n’est pas sans rappeler un duel aux couteaux aussi dans La Fureur de vivre, mais ceci à la base peut tout simplement rappeler les multiples duels armés qui opposent, quel que soit le contexte, deux hommes n’ayant pas pu négocier oralement, ici la violence l’emporte sur la discussion. Ce duel d’ailleurs a des aspects burlesques avec cette opposition entre deux hommes qui ont du mal à s’achever l’un et l’autre, notamment quand ils glissent à cause de la peinture. Mais avec subtilité, Kurosawa substitue à la mort impressionnante du jeune Matsunaga le retour discret et jovial d’un personnage secondaire, une jeune fille de 17 ans sauvée par les soins du médecin. Elle lui annonce la nouvelle, dans ce paysage urbain, aussi vaste qu’humaniste. Quant il apprend la mort de son jeune protégé, il perd les quelques espoirs qui lui restait en disant : ” Après tout, ce n’était qu’un pauvre gangster… Un chien reste un chien, rien ne peut le transformer “.

L’Ange Ivre est un film noir (inspiré du cinéma hollywoodien de l’époque), un thriller qui laisse un goût amer car il est pessimiste, mais il est juste et sincère. C’est aussi un film de gangsters, eh oui ! C’est une œuvre très métaphorique, très esthétique, contemplatif presque, une tragédie géniale. Certes, ce n’est peut-être pas le film le plus abouti du grand Akira Kurosawa, mais le mec a su s’imposer comme un leader du renouveau du cinéma japonais, à travers cette critique sociale et cette exposition bluffante de réalité avec des acteurs incroyables que sont Takashi Shimura et surtout Toshiro Mifune. Kurosawa se montrait clairement comme un humaniste, il avait ce don d’avoir un regard très extérieur sur ce qu’il faisait, il a compris comment il devait filmer pour capter l’attention du spectateur, à travers ces figures de style, ces dialogues, ces protagonistes qui deviennent très vite attachants, et le nombre de lectures qu’on peut y voir sans que le réalisateur n’est besoin de le montrer ou le dire directement. Ce film vaut la peine d’être vu pour tout ce que j’ai dit, mais aussi pour d’autres choses. C’est un des premiers films de Kurosawa, qui plus est l’un des plus personnels, la première apparition de Mifune devant la caméra du senseï. Ce film est une fable humaniste et sociale, avec une morale très belle, utopique peut-être, mais présente et essentielle. L’Ange Ivre est d’une grande efficacité narrative, il y a une profondeur dans les personnages, on a de grandes scènes marquantes, une atmosphère oppressante qui rappelle un peu un compte à rebours, qui annonce petit à petit le destin de Matsunaga, qui est fini d’avance et qui n’a plus rien à perdre. C’est un film dense en termes de thématiques, chaque scène étant une occasion de mettre en avant une critique sociale qui se met en place sans forcément l’évoquer directement. On a affaire à une tragédie shakespearienne intime, très réaliste et inspirée du néo-réalisme italien. Un film qui sent le traumatisme de la Guerre, sans qu’à aucun moment, ceci ne soit mentionné, et ça c’est très fort ! L’ange Ivre, titre qui est déjà un bel oxymore, est une œuvre quasi impérative à voir. Il n’a pas eu un impact sur le cinéma en général, mais il a permis de lancer la grande carrière de Toshiro Mifune et de Akira Kurosawa. Un film efficace qui laisse une liberté au spectateur sur la vision qu’il peut avoir de l’histoire, sur les personnages. Un film poétique et beau sur la problématique des codes d’honneur des yakuzas, de la damnation et de la solidarité, reflétant le désordre social après la Guerre dans les bas-fonds de Tokyo, ainsi que tout le Japon.

http://www.senscritique.com/film/L_Ange_ivre/critique/41375333

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http://www.controappuntoblog.org/2012/11/18/vivere-ikiru-1952/

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