LES TERRASSES, de Merzak ALLOUACHE

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Cinéma Algérie France

Un jour sur les terrasses de Merzak Allouache: autopsie d’un regard

media Sur la terrasse des survivants de la guerre civile. Un enfant et sa mère, réfugiés chez une tante… Les Films de l’Atalante

A ne pas manquer cette semaine. Merzak Allouache est toujours à l’affiche en France avec Les Terrasses. Un film qui démonte les ressorts de la violence en Algérie – dans une société au bord de la crise de nerf. Rappelez-vous, le cinéaste algérien n’est pas un inconnu des grands festivals internationaux comme Cannes ou Venise.

« C’est le film qui a eu le plus de succès au MK2-Beaubourg cette semaine », annonce fièrement Julien Navarro, des Films de l’Atalante, un distributeur indépendant qui sort depuis le 6 mai dans trois salles à Paris Les Terrasses, de l’Algérien Merzak Allouache. Ce film, qui a fait plus de 3 500 entrées en cinq jours à Beaubourg,aux 7 Parnassiens et au Louxor, passe haut la main le cap de la deuxième semaine, où il est aussi à l’affiche au cinéma La Clé. Sans compter sa programmation en province. Une distribution toutefois tardive, pour une œuvre plusieurs fois primée l’an dernier et projetée en sélection officielle à la Mostra de Venise 2014…

Merzak Allouache. DR

Merzak Allouache n’est pourtant pas un inconnu, y compris des grands festivals internationaux. Rappelez-vous, au festival de Cannes, il avait présenté à la « Semaine de la Critique » en 1977 son premier long-métrage de fiction, Omar Gatlato, qui raconte avec humour le quotidien chaotique d’un jeune homme en quête d’amour dans une Algérie libérée du joug colonial. Puis, ce fut Bab El-Oued City, proposé sur la Croisette en 1994 dans la section « Un certain regard ». Tourné comme le précédent dans ce quartier populaire d’Alger au lendemain des émeutes de 1989, ce film dénonçait – déjà – la dérive intégriste. Sans oublier Salut Cousin ! sélectionné en 1996 à la « Quinzaine des réalisateurs ».

Une exploration de cette société complexe et perturbée

Baie d’Alger, entre l’aube et le lever du jour. La caméra balaie les arbres plantureux de la place de la Grande Poste, tandis que le chant du muezzin appelle à la première prière : « Qu’Allah nous protège » Les Terrasses se déroule, l’espace d’une journée, sur cinq terrasses de la capitale algérienne – Notre Dame d’Afrique, Bab El-Oued, la Casbah, Telemly, Belouizdad (Belcourt). Un récit ponctué par cinq appels à la prière, « une ambiance sonore que l’on retrouve dans toutes les villes du monde arabe », ironise l’auteur, présent lors de la première projection publique. C’est dans ce cadre que cinq histoires différentes et tragiques finiront par se croiser. L’occasion pour le cinéaste de poursuivre son « exploration de cette société complexe et perturbée, à travers une galerie de portraits incroyable, faite d’une trentaine de personnages ».

«Les Terrasses» de Merzak Allouache. Les Films de l’Atalante

« Les terrasses sont dans tous mes films. Les terrasses d’avant », celles des femmes d’Alger qui les utilisaient comme buanderie pour laver et étendre le linge, ou qui les transformaient en espaces de fête, le temps d’un mariage. Des lieux de tranquillité où les voisins pouvaient se rencontrer et admirer la splendeur de la ville. C’est pendant les repérages de son téléfilm, La Baie d’Alger, que Merzak Allouache a découvert les terrasses d’aujourd’hui, « dénaturées par la décrépitude et la saleté », dit-il, des « lieux absolument dramatiques » du fait de la surpopulation due à l’exode rural. « Les terrasses sont devenues un espace de vie, de violence et de mort ». Des lieux où on vit, des lieux où on passe… Les terrasses ont progressivement été squattées, transformés en habitation, en lieu de business ou de prière…

Merzak Allouache a été « fasciné par le paysage à la fois merveilleux et déchirant qui s’offrait à mon regard ». Il  a su saisir l’opportunité de s’approprier ces espaces à la fois publics et privés propices au cinéma : « C’était formidable d’avoir un studio à ciel ouvert, qui se prêtait à la mise en scène… Et en plus, au calme, hors de la rue. » Unité de temps, unité de lieu, unité d’action, le film est imposant par sa structure implacable. Réalisé comme cinq courts-métrages parallèles, il est servi par un scénario unique écrit par un homme versé dans l’art. Sa simplicité est aussi adaptée aux conditions du tournage, budget réduit, équipe réduite. Tournage qui n’a pas été une sinécure : en tout onze jours, deux jours par terrasse et trois pour l’une d’entre elles où les enchères commençaient à grimper pour la location du lieu.

 

Les Terrasses Merzak Allouache. Les Films de l’Atalante

« Il y a quelque chose qui ne va pas »

« A Alger, il y a un problème d’insécurité incroyable. (…) La situation est très tendue », poursuit Merzak Allouache qui constate à travers son film : « On ne s’aime plus en Algérie. Il n’y a plus de projet commun ». Le réalisateur parle d’une « violence latente » dans « un pays au bord de la crise de nerf ». C’est ce que dit la chanson des musiciens qui occupent une des terrasses pour les répétitions de leur groupe : « Dans ce pays, personne n’aime personne… Rachid n’aime pas Ali. Ali trahit Mohammed… »

« Il y a quelque chose qui ne va pas. Quelque chose qui n’est pas réglé depuis la violence extrême de la décennie noire », déplore le cinéaste algérien qui pose un regard d’autant plus acéré sur sa société qu’il ne vit plus en continu dans son pays. Une société éclatée dont il juge qu’elle n’est pas apaisée, dans une ville qui « fourmille de rumeurs essentielles » mais se soumet à l’autocensure, à l’image du pays tout entier, gagné par l’amnésie de sa propre histoire.

Outre la terrasse des musiciens, il y a celle où survit cet enfant de la guerre civile. Sa mère, traumatisée à vie, a accouché de lui après avoir été violée par ses ravisseurs intégristes. Ils sont réfugiés chez une vieille tante, qui peine à conserver son espace vital mais qui, par miracle, reçoit la protection inopinée d’un commissaire débonnaire qui couvre ses frasques – par pure humanité. Une lueur d’espoir dans ce film sombre… Mais Allouache s’en défend. Il n’a pas voulu donner « une fin heureuse et artificielle » à cette fresque d’une société bloquée.

La folie domine aussi largement le paysage de la terrasse où vit ce vieil homme enchaîné dans sa cage, dont on ne voit jamais le visage. C’est le personnage du fou – du majnoun, figure du sage dans les contes arabes. Une petite fille lui apporte à manger, lui raconte des histoires et assiste, impuissante, à ses crises dans lesquelles il hurle à la trahison lors de « ces décennies de langue de bois, de la guerre de libération à la guerre contre le terrorisme ». Sans préciser de quel type de trahison il s’agit.

Et que dire encore de la terrasse des frérots, qui viennent prier le soir sur fond de bizness pas très nets, ou de celle des cinéastes branchés venus tourner quelques panos sélectifs de la ville blanche sur les hauteurs d’une villa luxueuse, mais inachevée, dont les sous-sols glacés servent de chambre de torture au propriétaire qui, ce jour-là, règle un litige familial… Quand la sphère privée est gérée avec la même cruauté que l’espace public… Espérons seulement que les salles algériennes montrent enfin un jour ce film expiatoire à son public.

Les Terrasses, un film de Merzak Allouache. Films de l’Atalante, 2014.

http://www.rfi.fr/hebdo/20150515-cinema-algerie-france-terrasses-violence-merzak-allouache-autopsie-regard/

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