Ghelco : Dix ans sans patron et l’usine tourne toujours

Ghelco : Dix ans sans patron et l’usine tourne toujours

Posted on janvier 7, 2012 by laama | Laisser un commentaire

Si, pour nous communistes, la gestion par les ouvriers d’une usine en restant dans le cadre du système capitaliste n’est en rien la création d’un “îlot de socialisme dans une mer bourgeoise”, il est toujours intéressant de souligner avec un exemple concret et actuel à quel point les patrons sont inutiles. Cela n’empêche pas que pour briser l’oppression et l’exploitation, ce n’est pas seulement l’usine mais aussi et surtout le pouvoir d’Etat dont les ouvriers devront s’emparer.

 

’Express, 7 janvier 2012 :

Argentine : L’usine, reprise par ses employés après la crise de 2001 et transformée en coopérative, ne fonctionne qu’à 40% de sa capacité. Pourtant ses travailleurs touchent trois fois le salaire minimal argentin.

Dans un hangar du sud de Buenos Aires, une cinquantaine d’ouvriers en uniforme s’agitent autour d’immenses machines pour confectionner pâtes de chocolat, crèmes chantilly et autres produits sucrés destinés aux glaciers et pâtissiers. A première vue, une usine assez traditionnelle. Mais ici, point de contremaître, pas d’homme en costume gris donnant des ordres, encore moins d’actionnaires.

“A Ghelco, toutes les décisions sont votées par les ouvriers à la majorité”, explique Daniel Lopez, 41 ans, machiniste et président de cette coopérative. Comme plus de 200 entreprises argentines, Ghelco a été récupérée par ses employés après la grande crise de 2001. Des entreprises employant près de 10 000 personnes qui, dix ans plus tard, continuent de fonctionner. A l’époque, la situation de Ghelco est pourtant aussi critique que celle du pays. Mal gérée, la société est fortement endettée et multiplie les plans de rigueur. En décembre, les salaires sont divisés par deux. C’est l’explosion. Les manifestations s’enchaînent dans l’usine comme dans tout le pays. En janvier 2002, le pays se déclare en défaut de paiement. Quelques semaines plus tard, Ghelco annonce sa faillite…

“C’était ça ou faire les poubelles”

“Quand nous sommes allés voir le juge pour demander de reprendre la fabrique, il nous a ri au nez”, se rappelle Daniel. “Des personnes très qualifiées ont échoué, et vous pensez réussir ?” s’entendent-ils répondre. Mais les Ghelco s’accrochent. “Il n’y avait plus de travail dans le pays. C’était ça ou faire les poubelles”, explique José Guglielmero, 54 ans. Pendant six mois, les ouvriers campent donc devant l’usine, la faim au ventre, empêchant les anciens patrons d’emporter les machines.

“Le plus dur, changer de mentalité”

En juin 2002, victoire : ils obtiennent le droit de louer les locaux. Plusieurs lois favorables aux travailleurs leur permettront par la suite de racheter l’usine, avec un crédit de vingt ans consenti par le gouvernement. En misant sur la qualité et en travaillant au départ jusqu’à seize heures par jour, ils reconquièrent des clients. Résultat : aujourd’hui, chaque travailleur de Ghelco touche 800 euros par mois, trois fois le salaire minimal argentin. Daniel a même pu s’acheter une petite maison.

Certes, tout n’est pas rose dans ce temple du sucre. “Au début, prendre des décisions en groupe était un casse-tête, reconnaît José. Le plus dur est de changer de mentalité. Certains attendent toujours d’être contrôlés pour travailler.” Et Daniel ajoute : “Nous manquons aussi de connaissances en marketing pour augmenter nos ventes.” L’usine ne marche qu’à 40 % de sa capacité et peine à économiser pour rembourser sa dette.

Pourtant, les ouvriers ne regrettent pas. “J’étais en dépression. Avoir des responsabilités m’a ressuscité”, confie Daniel. En Argentine, la croissance est d’ailleurs de retour, le taux de chômage a été ramené à 7 %, mais des ouvriers choisissent encore régulièrement de récupérer leur usine en faillite, par attachement ou simplement pour vivre sans patron.

http://communismeouvrier.wordpress.com/2012/01/07/ghelco-dix-ans-sans-patron-et-lusine-tourne-toujours/

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